Le 10 juin 1819, Gustave Courbet voit le jour se lever sur Ornans, dans une famille à l’abri du besoin. Dès quatorze ans, il est initié à la peinture par le père Baud, mais ce n’est que vers vingt ans qu’il se décide à en faire sa profession. Sensible aux tableaux qu’il trouvait au Louvre, comme Rubens, Caravage ou Vélasquez, Courbet se cherche encore. Ses tableaux sont grandiloquents, notamment ses autoportraits le mettant en scène.

Ici, on le voit dans une posture théâtrale et exagérée. L’artiste se tient la tête et écarquille des yeux exorbités d’effroi. La manière de se représenter est novatrice, notamment sur le traitement des couleurs et de la lumières semblant projeter le visage hors de la toile. Courbet donne donc le la et exprime déjà sa volonté de transgression des normes.
En effet, il était un peintre qui cherchait à défier l’établi grâce à sa peinture. Dans Le retour de la conférence de 1863, il avait peint des ecclésiastiques éméchés, titubants sur un chemin de campagne.

L’outrage à la morale religieuse est tel qu’on lui refuse le Salon officiel et des Refusés de 1863. D’ailleurs, nous n’avons plus aucune trace de cette toile, sans doute détruite. Ainsi, connu pour ses engagements sociaux et politiques, il est élu Président de la Fédérations des artistes, dès la chute du Second Empire et est resté à Paris malgré l’invasion prussienne. En février 1881, il confirmait cet engagement en se présentant aux élections législatives, mais son succès resta timoré. Qu’à cela tienne, quelques mois après sa défaite, il est chargé de deux nouvelles missions par la commission exécutive de la Commune : rouvrir les musées parisiens et organiser le Salon.

Ainsi, Courbet aimait peindre des personnages issus du peuple. Fidèle à sa ville, il a représenté dans ce tableau ce qui lui est le plus cher : le réalisme. Loin des scènes d’histoire, il montre la simplicité du quotidien. Les quatre hommes semblent profiter du repos, attablés et écoutant de la musique. En fait, cette scène relate un instant de vie vécu par l’artiste dans sa propre famille. Il donne même l’identité de chaque personne : Son père, Régis Courbet, est assis à gauche, les jambes croisées, derrière la table se trouve le maître des lieux, Urbain Cuénot, à l’ombre du violon, Alphonse Promayet, un autre ami d’enfance du peintre et enfin Adolphe Marlet, le chasseur, est représenté de dos en train d’allumer sa pipe, avec son chien endormi sous sa chaise.
Sa transgression n’était donc pas uniquement politique : il cherchait la nouveauté dans la peinture en réalisant des tableaux nerveux dans la touche, vaporeux dans l’effet et forts dans l’expression, comme on vous l’expliquait à propos de La Vague.
Artiste éclectique, Courbet se met aussi en scène en peintre dans son habitat naturel : l’atelier. Cet immense tableau-manifeste marque l’apogée des idéaux du peintre, dont témoigne le sous-titre donné par l’artiste, Allégorie réelle déterminant une phase de sept années de ma vie artistique et morale.

La peinture est impressionnante de techniques, détails. L’action de la toile est articulée autour de la figure centrale du peintre, lui-même élaborant un autre paysage ; sur le côté gauche sont représentés les personnages combattus par Courbet, comme le banquier, le curé et les marchands d’art ; à droite sont installés les amis du peintre comme Champfleury. Courbet peint aussi des personnages plus caricaturaux, afin de signifier des classes sociales particulière comme le petit paysan debout à côté de lui.