Les longues soirées d’hiver, j’aime les passer avec un bon livre. Mais parfois, j’ai des envies soudaines de rire et d’émerveillement. Certains vont opter pour un bon film, d’autres regarder des vidéos amusantes, moi mon truc ce sont les cafés-théâtres. J’aime me laisser surprendre par les créations d’artistes plus ou moins connus, découvrir des ambiances mais aussi la richesse de l’expression théâtrale. De la comédie humoristique au one-man show, en passant par l’improvisation ou le cabaret, il y en a pour tout les goûts. Un vendredi, prise d’une envie soudaine de légèreté, je réserve une place pour la comédie-boulevard saluée par la critique : Barcelone-Amsterdam de Marlène Noël et Philippe Elno.
20h00 au théâtre Les Vedettes de Lyon, nous sommes une petite quinzaine devant une scène au décor minimaliste. Très vite, les deux comédiens nous embarquent dans un voyage ferroviaire poétique qui oscille entre maladresse et tendresse, désir et retenue, paroles et silences. Face aux gaucheries de Monsieur Marchand et à l’irrésistible attraction de Mathilde, je me détend.
https://www.youtube.com/watch?v=N11HTsBaozE
21h09, fin du voyage, tout le monde descend. Et c’est la douche froide. J’ai passé un agréable moment mais je reste sur ma faim. Mon rire s’est évanoui avec les derniers applaudissements. Je revois mentalement les scènes mais je ne retrouve aucune trace de cette légèreté. Je rentre abattue alors que je cherchais à m’étourdir. Que s’est-il passé ? Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné ?
Ce jour-là, je suis tendue comme un arc, mentalement absorbée par mes tracas et j’attends beaucoup de ce spectacle. Ce que je cherche c’est un exutoire. J’ai envie et besoin de décharger le trop plein d’émotions et de tensions. J’ai ri certes, mais ce rire n’était pas un rire profond et physiquement libérateur. Rien à voir avec l’ivresse d’un fou rire qui vous secoue et balaye tout sur son passage. Ce soir-là c’est ce frisson que je cherchais à atteindre. Si j’avais été honnête avec moi-même j’aurai regardé de plus près la vraie raison pour laquelle je sortais. J’y serai très certainement allée mais avec une toute autre disposition. Je n’aurai pas remis mon bonheur entre les mains des acteurs. Ce soir-là, j’ai donné raison à Georges Perros qui disait que “L’écriture c’est passer le temps. La musique c’est le faire passer. La peinture c’est l’effacer.”

Réalisée par Roxane Le Texier – Taille 679 x 960
Source: Page Facebook Mes Ex le spectacle
Nous avons tous vécu cela. Parfois, consommer de l’art nous comble. Mais se rendre seule dans un café-théâtre exige d’être au clair avec nos intentions. En effet, l’intimité entre acteurs et spectateurs nous oblige à être pleinement présents et impliqués, tant pour porter les comédiens que pour faire vivre l’œuvre. Forte de cette prise de conscience, je réitère l’expérience. Je me décide pour l’Espace Gerson et la comédie musico-romantique Mes Ex avec Barbara et Marion Laurent. Je suis détendue, attentive aux réactions des spectateurs qui m’entourent et à ce qui se passe en moi. Je ris, je me laisse porter et la magie opère. Je rentre chez moi le cœur léger, la tête plein de rires. Je suis conquise par l’univers pétillant de Barbara.
Notre état d’esprit est-il le seul élément qui peut tout faire basculer ? La manière dont le public clôt le spectacle est pour moi cruciale dans l’appréciation d’une œuvre. J’adore Mado la Niçoise. J’ai eu la chance d’aller l’applaudir à Marseille au printemps dernier. Certains sketchs me faisait pleurer de rire alors que mes voisins restaient de glace ou même s’offusquaient. J’aurai pu me retenir mais j’avais envie de savourer. J’ai passé un moment exquis. Pourtant, j’ai ressenti une certaine amertume. À peine le rideau baissé, de nombreux spectateurs se sont levés. Noëlle Perna a salué un parterre qui se vidait. Alors que certains applaudissaient à tout rompre, d’autres se bousculaient en râlant pour sortir les premiers. J’ai été coupée dans mon élan car je n’ai pas eu le temps de revenir sur Terre à mon rythme. En sortant du Silo, j’ai alors repensé à la froideur et au vide que m’inspire le tableau La Sortie de théâtre de Jean Béraud.

Source : http://ag.louvre.fr/detail/oeuvres/0/228876-La-sortie-du-theatre-max
Notre météo intérieure, les gens qui nous accompagnent, le lieu mais aussi notre capacité à extérioriser notre ressenti influencent le déroulé et l’appréciation d’un spectacle. Aborder l’art avec humilité et bienveillance dans le respect de nos valeurs sans rien chercher à obtenir nous permet d’être un bon spectateur. Alors avant de dire “c’est nul” ou “c’est moche”, ne serait-il pas plus juste de regarder ce qui s’est joué en nous ?
Céline Redon
j’ai découvert le théâtre il y a trois ans,et c’est vrai que si on apprend à analyser l’histoire et les personnages dans le sujet,on peut être satisfait du spectacle,il faut être dans la peau des personnages afin d’entrer dans le spectacle,donc ne plus être soi,mais être quelqu’un d’autre…
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