
Tout le monde a une vague idée de ce qu’est le ‘’génie’’, mais si on nous demande de le définir clairement… C’est impossible. Dans « Mythologies » Roland Barthes exprimait les préjugés communs de ce concept, le mythe empêchant de juger objectivement. Ainsi quand on pense au génie on a déjà une structure mentale qui nous est imposée et tout son cortège d’idées reçues. Mozart, Van Gogh ou Kurt Cobain correspondent tous à cet archétype.
Le génie maudit
Au XIXe siècle, le génie artistique était défini au travers de critères arbitraires : torturé, imprévisible, complexe et inaccessible, le génie était incompris. Si on résume le fantasme lié à cette idée, il est un être à la destinée exceptionnelle mais souvent douloureuse.
Prenons l’un des artistes peintres les plus importants de la deuxième moitié du XXème siècle : Jackson Pollock. Manifestement alcoolique et dans une grande précarité, il fut tardivement reconnu et défendu par des critiques d’avant-garde, or ce sont bien ces aspects de sa vie qui ont tendance à être mis en valeur dans sa biographie.

Ce fut aussi le cas de beaucoup de peintres qui, s’ils ne furent pas des « artistes maudits », ont au moins connu une période de forte pauvreté avant leur succès, comme Picasso. C’est comme si pour devenir un GRAND peintre il fallait au préalable avoir été rejeté par la société.
Le génie est supérieur
En histoire de l’art on rencontre beaucoup de « génie ». Il faut dire que la discipline se donne comme fondateur Vasari, un peintre et biographe d’artistes de la Renaissance. Au travers de ses écrits, il cherchait à vanter et démontrer le caractère hors du commun des créateurs : leurs œuvres étaient exceptionnelles, tout comme leurs vie et leurs facultés jugées comme supérieures. Des historiens ont comparé l’écriture de Vasari avec celle de l’hagiographie (c’est à dire les biographies des Saints écrites sur un ton de louange). La naissance du discours sur l’art est donc liée à une glorification des artistes. On comprend aussi que tout cela était baigné de religiosité et que le « génie » de l’inspiration ressemble beaucoup au Saint-Esprit qui insuffle la foi aux hommes.
Pourtant au 18ème siècle, on ne parle pas encore D’UN génie mais DU génie de quelqu’un : que ce soit en peinture ou en musique, il était une entité qui “visite” un créateur. Ainsi le génie n’est pas la personne elle-même mais une sorte de force extérieure qui vit en lui. Puis, durant le 19ème siècle, on arrête d’avoir du génie pour être un génie. C’est le concepteur même qui devient un être exceptionnel et différent du commun des mortels… c’est aussi à ce moment que les fantasmes du génie et de l’artiste maudit se rassemblent.
Supposer que le génie est une chose tombée du ciel, c’est oublier que c’est avant tout le fruit d’un travail et pas un don. Méfions-nous quand on crie au génie, c’est souvent qu’il n’y a rien d’autre à dire.
[…] voudrait nous faire croire que le prétendant à l’art suit une prédisposition naturelle, mais il y a tout de même, selon toute vraisemblance, la nécessité de développer ce talent à […]
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