Représenter l’au-delà au Moyen Âge : le tympan de la cathédrale d’Autun

Le portail de la cathédrale d’Autun est un bon exemple des nouveaux thèmes de la période médiévale liée à la mort et sa perception. Daté du XIIe siècle, il s’inscrit dans un rayonnement de l’art roman en Bourgogne, région qui connait un développement important notamment en raison de la présence de Cluny III, à la fin du XIe, dont les concepts artistiques se diffusent.

Les tympans des églises et cathédrales romanes sont le lieu de nouveaux essais décoratifs. Au début du XIIe siècle, les mentalités des populations médiévales tendent à muter, ouvrant la voie à un questionnement autour de la mort. De nouvelles scènes bibliques sont représentées, comme le Jugement dernier de l’Apocalypse de Saint Jean (Apocalypse, 20, 11-15). Ce qui concorde également avec la naissance du thème du purgatoire : l’au-delà inquiète la population médiévale, instaurant une autre perception des récits des Évangiles et de leurs représentations.

Vue du portail de la cathédrale Saint-Lazare d'Autun, XIIe siècle, Bourgogne
Vue du portail de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, XIIe siècle, Bourgogne. Crédit photo : lieuxsacres.canalblog.com

Le tympan de la cathédrale d’Autun présente un Christ en Majesté, portant un nimbe crucifère, dans une mandorle soutenue par quatre anges. Il domine plusieurs scènes ayant un lien avec le Jugement dernier. A dextre prend place la représentation de la pesée des âmes, divisée en deux registres. Au niveau inférieur, le décor montre les Enfers où se situent l’Archange Michel, situé proche du Christ, et un démon pesant les âmes des défunts.

Tympan du Jugement dernier, portail de la cathédrale Saint-Lazare d'Autun, détail, la pesée des âmes et les enfers.
Tympan du Jugement dernier, portail de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, XIIe siècle, Bourgogne, détail, la pesée des âmes et les Enfers. Crédit photo : Wikipédia, Daniel Gaudry

Au niveau supérieur, il semblerait que soient représentés Saint Jean et Saint Jacques, nimbés, à côté d’un ange tenant les trompettes de l’apocalypse. A senestre, Saint Pierre, ayant pour attribut les clefs, fait entrer les justes au Paradis. Au registre supérieur, la Vierge nimbée, semble jouer le rôle d’intercesseur.

Tympan du Jugement dernier, portail de la cathédrale Saint-Lazare d'Autun, XIIe siècle
Tympan du Jugement dernier, portail de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, XIIe siècle, Bourgogne. Crédit photo : Wikipédia

Dos à Saint Pierre, d’autres personnages sont représentés nimbés, peut être des apôtres. Cette partie du tympan figure également la Jérusalem Céleste, symbolisée par la partie architecturée à l’extrême gauche. Sa présence n’est pas anodine, elle montre l’entrée des élus en son sein. Quant au linteau il présente la Résurrection des Morts, divisé en deux parties au niveau du trumeau, scission également indiquée par la présence d’un ange. A senestre, les élus, regardent vers le haut et donc vers le Christ ou le Ciel, alors qu’à dextre des damnés baissent la tête. Parmi les élus, qui sont représentés par des hommes, d’autres classes sont évoquées : des évêques et des pèlerins. Ici, il est souligné que seul un homme bon et ayant la foi a le droit d’avoir accès au Ciel. A contrario, les damnés démontrent que le pécheur n’est pas accepté, notamment par la présence de la figure de la luxure symbolisée par un serpent aux pieds d’une femme.

Vue du portail de la cathédrale Saint-Lazare d'Autun, détails du linteau
Vue du portail de la cathédrale Saint-Lazare d’Autun, XIIe siècle, Bourgogne, détails du linteau. Crédit photo : lieuxsacres.canalblog.com

Ce décor est accompagné d’inscriptions en lien avec les scènes représentées. Toutefois, en dessous de la figure du Christ, on peut lire « Gislebertus hoc fecit ». L’artiste aurait alors signé son œuvre, sortant ainsi de l’anonymat caractérisant la majeure partie des décors de l’époque romane. L’endroit où il appose son nom a une grande force symbolique puisqu’il se place proche du Christ. On peut imaginer qu’il s’insère ainsi dans les prières faites par les fidèles devant ce tympan, comme on le voit pour l’abbé Suger représenté sur les vitraux de Cluny III. Cela pourrait aussi tendre à démontrer qu’il y a bien une diffusion des idées et un rayonnement clunisien.

L’époque romane met en relation le terrestre et le céleste, notamment avec le purgatoire, donnant naissance à des scènes moralisées. Le tympan d’Autun n’est pas le seul exemple de ces thèmes iconographiques. En effet, des portails comme ceux de l’église de Moissac ou encore de Vézelay abordent également le Jugement dernier. Cette période est marquée par les nouvelles formes artistiques, emplies de symbolisme. Le fidèle est alors exhorté à avoir une réflexion sur son humaine condition mais aussi sur ses actions et leurs conséquences dans l’au-delà.

Ophélie Nimeskern

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