Charles Bradley s’est éteint le 23 septembre des suites d’un cancer. L’artiste né à la fin des années 1940 était âgé de 68 ans. Son combat face à la maladie est à l’image de la lutte qu’il a menée contre les malheurs de sa propre vie.
Du cuisinier à l’artiste

Le chanteur de soul est né en 1948 à Gainesville en Floride, mais a passé son enfance dans les rues de New York. Outre sa carrière d’artiste, il a exercé principalement en tant que chef cuisinier mais n’a jamais renoncé à ses rêves de chanteur : après avoir résidé en Californie, au Canada et en Alaska, il s’est décidé à revenir dans sa ville natale pour réellement percer dans la musique. Il se lance donc à 51 ans, sous le pseudonyme de Black Velvet, mais il lui a fallu attendre de rencontrer Gabriel Roth (co-fondateur du label Daptone Record), pour que sa carrière soit propulsée : pris sous son aile, il pu signer sur son label. Son premier single s’intitule « Take it as it comes » (« prends-le comme ça vient »).
Le groove de James Brown, la soul d’Otis Redding
L’artiste s’est d’abord fait connaître en reprenant des titres de son idole James Brown, qu’il a vu pour la première fois à 14 ans à l’Apollo, illustre théâtre de Harlem, figure de la musique noire américaine. Le jeune adolescent fut impressionné par l’énergie et le sens du spectacle du parrain de la soul. Il ne put s’empêcher de tenter de reproduire les mouvements de celui qui est devenu son artiste favori. L’influence de « Myster Dynamite » se retrouve dans le dynamisme et la puissance transmis lorsque Bradley se représente sur scène. Ses morceaux emplis de soul et d’émotions le relient néanmoins beaucoup plus au style d’Otis Redding. Ce n’est qu’en 2011 que son talent a véritablement été reconnu et qu’il a connu un début de succès avec l’album « no time for dreaming » (« pas le temps de rêver »).
Un showman écorché vif

Charles Bradley s’en est allé comme il a survécu : dans l’effort, la douleur et le combat. Il a succombé à un cancer de l’estomac, après avoir connu une vie trépidante, faite de difficultés et d’épreuves. Comme ce fut le cas de nombreux artistes noirs américains, la magie qui s’opérait sur scène provenait bien souvent d’une peine incommensurable. Charles Bradley n’échappe pas à cette règle. Le décès de son frère, celui de sa mère, la pauvreté subie et son vécu dans les rues difficiles de New York ont assurément forgé son caractère de battant. Mais ces peines l’ont également affligé et affaibli. Il chantera son mal-être sur scène comme pour exorciser sa douleur. Triste ironie du sort pour ce chanteur émotif et attachant, qui est décédé d’un cancer de l’estomac, mais n’en demeure pas moins un interprète qui chantait avec ses tripes.
Tony Toilier