Zoom sur le château de Lourdes

Lancées en 1984 par le ministère de la Culture français, les Journées du patrimoine restent le rendez-vous incontournable de la rentrée. Trente-quatre années plus tard, près de 17 000 monuments sont sur le point d’ouvrir leurs portes le troisième week-end de septembre, placé sous le thème de la jeunesse. A cette occasion, intéressons-nous de plus près à un monument profondément inscrit dans le cœur des pyrénéens, à l’histoire encore méconnue du grand public : le Château de Lourdes surplombant la Bigorre du haut de son piton rocheux.

Le château de Lourdes - vue panoramique
Le château de Lourdes, photographie de Marion Spataro

Un témoin de l’histoire

Depuis que l’érosion glaciaire du quaternaire (il y a environ 50 000 ans) a modelé le paysage lourdais, la situation particulièrement escarpée de ce piton calcaire central n’a jamais cessé de fasciner l’homme qui a su tirer parti de sa position stratégique dès l’âge du fer. En effet, Lourdes (65) a entretenu une relation privilégiée avec son Château Fort. Les deux sièges destructeurs connus par la ville en 1374 et 1573 ont miraculeusement épargné quelques données, qui confirment une longue occupation du site par l’homme, depuis la lointaine civilisation pyrénaïque jusqu’à la fin de la civilisation antique. Toutefois, l’état actuel du château reste le fruit d’une évolution continue de la fortification, son histoire ne débutant officiellement qu’à partir du XIe siècle, où il servit de résidence principale aux différents comtes de Bigorre. Abandonné un siècle plus tard au profit du château de Tarbes (65), il sera destiné à remplir une fonction exclusivement militaire. Sa forteresse permettait de contrôler l’axe économique et guerrier entre les territoires bigourdans et béarnais voire, par certains aspects, les mouvements français et espagnols.

Château, vue extérieure
Le château de Lourdes, photographie de Marion Spataro

Véritable enjeu dans les multiples conflits déchirant le piémont pyrénéen à partir du XIIIe siècle, sa vocation lui aura permis de développer un ensemble d’éléments défensifs capable d’assurer sa protection. Réparée en 1314 sur ordre du roi Charles IV, la forteresse s’imposera dès la fin du Moyen-Age comme inexpugnable avec ses quatre tours, ses remparts, son logis seigneurial et ses casernements. De cet imposant ensemble défensif – à l’exception de l’enceinte, de l’assommoir et de la citerne – il ne reste plus que le donjon d’observation qui, du haut de ses 25 mètres, témoigne de l’architecture des châteaux de montagne et dont on ignore la date de construction.

Château - Chemin de ronde et pointe du cavalier
Le château de Lourdes, Chemin de ronde et pointe du cavalier, photographie de Marion Spataro

Confisqué par le roi de France Charles IX en 1568, au commencement des guerres dites de religion, le château devient le théâtre d’affrontements sanglants entre catholiques et protestants. Il subit alors deux nouveaux sièges infructueux en 1573 et 1592, avant que la paix ne revienne avec l’accession au trône de France d’Henri IV. C’est là que Lourdes fit son entrée dans le patrimoine de la couronne grâce à l’édit du 18 juillet 1607. A l’initiative du nouveau souverain, le château fut entièrement remanié par l’architecte Jérôme Vise qui supprima les tours médiévales pour le transformer en forteresse horizontale, plus efficace face à l’artillerie moderne. De cette époque datent l’actuel bastion Chausenque (à l’Est) ainsi que la pointe du cavalier (au sud), réparés en 1665 à la suite de tremblements de terre.

Il faudra attendre septembre 1685 pour comprendre l’évolution architecturale de la forteresse, qui fut l’objet d’un mémoire rédigé par Vauban en personne et dont certaines propositions comme le pont-levis à cornes, seront réalisées dès 1962.

Château - Pont-levis à cornes
Le château de Lourdes, Pont-levis à cornes, photographie de Marion Spataro

Du fort au musée

A partir de la fin du XVIIème siècle, le château de Lourdes abandonne peu à peu son statut militaire pour celui de prison d’Etat, par les deux cents lieues qui le séparent de Paris. Ainsi, ce dernier accueillit les prisonniers relégués sur le principe de la lettre de cachet comme le duc de Mazarin. A la Révolution, la forteresse conserve son affectation, le gouvernement révolutionnaire ayant renforcé l’effectif de la garnison devant la menace d’invasion étrangère en 1792 et la Terreur en 1793. Préoccupé par le sort des détenus, le commandant du château Vincent de Chausenque fit couvrir le donjon médiéval de sa toiture actuelle, afin de palier aux problèmes d’humidité rongeant les cellules, confirmant ainsi la perte d’intérêt pour la vocation stratégique du lieu.

Château - chapelle
Le château de Lourdes, chapelle, photographie de Marion Spataro

Considéré comme un monument « romantique »  tout au long du XIXème siècle, le château de Lourdes n’est plus qu’une étape pour les voyageurs que décrivent, non sans admiration, des écrivains tels que Emmanuel Viollet-le-Duc, Alfred de Vigny ou Victor Hugo. Alors que son état général se dégrade, la forteresse sera sauvée par le génie militaire de 1828 à 1856, remaniant l’ensemble du monument afin de permettre l’apprentissage des jeunes officiers. Ainsi sont successivement détruits puis reconstruits de nombreux éléments, avant que l’édifice soit définitivement déclassé du rang de place forte par le décret du 27 mai 1889. Mis en vente le 28 décembre suivant, le château sera racheté en 1894 par la ville de Lourdes qui y installa son musée en 1920. L’établissement connaît un vif succès durant l’entre-deux guerres, profitant de la progression constante du nombre de pèlerins convergents vers Lourdes au lendemain des « Apparitions » de 1858.

Témoin majeur de l’histoire de la ville du XIème siècle, le château fort de Lourdes sera classé Monument historique en 1995 tandis qu’il faudra attendre 2002 pour que son  « Musée Pyrénéen » reçoive le label « Musées de France » par le ministère de la Culture. Fort de la volonté de ses premiers administrateurs, l’établissement possède aujourd’hui l’un des plus important fonds de recherches pyrénéennes mis à la disposition des chercheurs.

Et si le pyrénéisme tient une place de choix au sein des collections exposées, le château de Lourdes continue d’accueillir des visiteurs du monde entier, à l’image de l’esprit de la ville dont il demeure incontestablement le gardien des traditions ancestrales

Marion Spataro

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