Laurent Bécue-Renard, réalisateur et producteur français est un habitué des sujets liés à la guerre et ses répercussions psychologiques. Il avait déjà évoqué ces conséquences dans un documentaire sur la guerre en Bosnie-Herzégovine, récompensé en 2001. Ce reportage retrace les difficultés pour vivre à nouveau à travers le témoignage poignant de 3 femmes bosniaques.
Le documentaire « Of Men and War »
Ce nouveau documentaire diffusé en 2014, pouvant être traduit par « Des hommes et de la guerre », traite une fois de plus des effets destructeurs de l’après-guerre sur les individus. Bécue-Renard aborde cette thématique par le biais de témoignages récoltées auprès de soldats de retour de la guerre d’Irak et d’Afghanistan.

Le réalisateur a côtoyé ces hommes cherchant réconfort et espoir de vivre, par des échanges thérapeutiques avec Fred Gussman, ancien vétéran de la guerre du Vietnam. Ces hommes meurtris tentent de se reconstruire et d’évacuer leur mal être relatif aux horreurs de la guerre. Celui-ci se traduisant par une fureur, de la souffrance et une profonde détresse. Le documentaire montre le cheminement et le parcours de ces soldats essayant de nommer et qualifier l’ineffable.
L’émergence du concept

Laurent Bécue-Renard en a tiré une notion existentialiste. Ces soldats tiraillés par des pulsions de vie et de mort se retrouvent dans une nouvelle guerre. Cette guerre, ils doivent la livrer avec eux-mêmes, avec leurs souvenirs et leur vécu douloureux. C’est une guerre qui les accompagne au quotidien et qu’ils doivent livrer seul pour ne pas périr ou se laisser anéantir par des souvenirs gênants et effroyables. L’entourage de ces hommes, leur femme et enfants mais aussi leur famille, doivent apprendre à vivre avec un proche méconnaissable, luttant contre ses propres démons.
Le réalisateur invente cette expression de « honte d’espèce » pour désigner l’ignominie et la noirceur des actes de l’homme envers ses semblables et la répugnance qui en découle. La « honte d’espèce » est née de l’immersion du réalisateur dans cet univers sordide et des échanges qu’il a pu avoir avec ces rescapés. Ce terme résonne assez justement lorsque l’on jette un œil sur la situation politique et dramatique internationale.
La “honte d’espèce” sur la scène internationale
La guerre en Syrie a détruit et continue de détruire le pays tout en entier. Celle-ci ayant causé la mort de près d’un demi-million d’individus. Les réactions au niveau mondial diffèrent selon les pays et le consensus n’est pas établi. Les opinions divergent et les dirigeants d’Etats peinent à proposer des solutions pertinentes et efficaces contre le massacre syrien.
L’attaque chimique de ces dernières semaines entraîne des réactions dans la continuité du conflit. Les pays sont désemparés, certains appellent au « crime contre l’humanité ». La résolution de cette lutte meurtrière n’est toujours pas effective. L’épouvante, l’aversion et la répulsion sont quant à eux, bien réels. La « honte d’espèce » apparaît donc comme une expression bien légitime prenant tout son sens.
Tony Toilier
Le TEDx où il parle de ses films m’a laissé sans voix…
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